De la nécessité d’agir

Depuis trop longtemps, les mouvements contestataires sont muselés, ou même réprimés lorsqu’ils commencent à faire masse. Il apparaît, de la part des gouvernants, une nécessité à semer la peur et le doute parmi leurs opposants. Ils procèdent systématiquement de la plus exécrable des manières : provoquer, faire croître la tension pour légitimer une réponse toujours plus féroce et plus ferme encore que ne peut l’être la gronde légitime de leurs opposants. Et si leurs actes sont le symbole d’un pouvoir aux abois, l’apparat qui accompagne ceux-ci l’est tout autant : des hommes et femmes en armes et armures, agissant docilement, dont les gestes sont pilotés par la peur de sortir du rang et d’être ainsi exclus d’un groupe où la camaraderie semble être forte, rejetés par les leurs. Il ne s’agît là que de constatations relatives à des tentatives d’expressions politiques populaires, la seule et unique réponse prend la forme d’une matraque tombant lourdement et implacablement sur le peuple.

C’est à cet instant précis qu’ils nous mettent face à notre propre éthique, notre capacité à juger du bien et du mal, faisant appel à notre « éducation », du moins pour beaucoup celle qu’ils ont bien voulu nous fournir, via leur machine à produire de bons petits travailleurs que représente aujourd’hui l’éducation nationale. C’est à cet instant précis que l’immense majorité renonce à franchir le pas de la désobéissance civile/insurrectionnelle/révolutionnaire. Basculer dans ce qui d’ordinaire serait considéré comme illégal, parfois même immoral, au risque d’y perdre ses libertés et/ou sa vie.

S’ils nous répriment durement lorsque nous souhaitons exprimer les souffrances quotidiennes qu’ils nous imposent, alors un jour ils auront à subir la souffrance qu’eux seuls ont infligée à l’immense majorité d’entre nous. Mais pourront-ils supporter le cumul de cette souffrance soigneusement répartie sur la masse ? Ce jour alors, ils comprendront où était leur intérêt, quel était le point de bascule à ne pas franchir, quelles manœuvres opérer pour remédier aux maux du peuple, quels bénéfices ils auraient pu en tirer. Mais toujours avec un temps de retard qui ne leur permettra pas d’échapper au sort qu’ils se sont imposé par leurs choix passés.

Par leur inaction, leurs mensonges, leurs négligences, ils tuent, souvent à petit feu. Mais de criminels, personne n’ose les qualifier ! Au crime certains seraient tentés d’y répondre par le crime, une façon de semer la terreur chez ceux qui auparavant la semaient aux fins d’un enrichissement personnel.

C’est hélas dans le désespoir et la précipitation que les gens agissent, et cela mène bien souvent à des actes sanglants à l’instar de ceux d’Emile Henry, d’Auguste Vaillant, de Théodule Meunier, Rinaldi ou encore de Ravachol. A nos gouvernants de décider ce qu’ils souhaitent, mais craignons qu’une fois de plus ils mènent cette politique de tensions, jusqu’à la rupture.

Comments are closed.